Ressources - L'Annonce faite à Marie

Présentation

Pour son premier opéra, le compositeur Philippe Leroux aborde un ouvrage littéraire mythique autant que mystique : L’Annonce faite à Marie de Paul Claudel, dont l’œuvre, indémêlable de sa foi chrétienne, revisite la figure de la Vierge. Un opéra en création mondiale qui convoque un espace poétique infini : tous nos sens seront en éveil entre le son travaillé par l’Ircam (Institut de recherche et de coordination acoustique/ musique), la richesse des timbres de l’ensemble Cairn, les voix des solistes rompus à l’écriture de Philippe Leroux et la scénographie subtile habitée de paysages du Tardenois natal de Claudel que nous offre la metteuse en scène Célie Pauthe.

Paul Claudel, un auteur oscillant entre réel et symbolisme

A la fois écrivain et dramaturge, Paul Claudel occupe aussi une position politique. Il entre d'ailleurs à l'Académie française en 1947 suite au décès de Louis Gillet.

Envoyé comme ambassadeur de France dans différents pays, il se nourrit de ces expériences. Les cultures découvertes sont une source d’inspiration pour Claudel que ce soit dans sa manière d’écrire ou dans les sujets choisis.

Contenus

En effet, un de ses plus grands ouvrages, Partage de midi, est un parallèle fidèle d’une expérience vécue. Dans cette pièce qui met en scène les échanges de quatre personnages : Ysé, la femme au centre des passions, de Ciz, son mari, Amalric, son amant, et Mesa, l’objet d’une passion nouvelle, Claudel y transpose sa propre expérience. Au cours d’un voyage en direction de la Chine, sur un navire, il rencontre Rose Vetch et son époux. Follement épris de cette femme, le désespoir frappe Claudel lorsque leurs chemins se séparent. De là naît ce texte où la religion et la passion sont au centre de tout, où cette dernière reconduit l’homme amoureux auprès de Dieu.

La religion lui permet d’aborder différents sujets, comme celui de la passion et du péché, de la grâce et de la pureté. L’Annonce faite à Marie, écrite en 1910 pour une première représentation en 1912, en démontrera l’apogée avec un écrit se concentrant autour de l’orgueil et de la charité prenant racine face à la mort, du miracle inexplicable et du pardon libérateur.

La figure religieuse apparaît de façon récurrente que ce soit dans ses poèmes ou dans ses pièces. Un questionnement récurrent qu’il met en place dès sa première tentative écrite, La Ville, où il évoque le conflit au sein de la société entre l’ordre et la vocation de l’homme à l’Éternité. Là, il pose la question suivante : quelle fin donner à la Cité ? - il y répond en affirmant que la fin de la société des hommes, c’est Dieu.

Contenus

Outre ce rapport à la religion, Claudel est un auteur intéressant du point de vue littéraire. Différent du théâtre occidental, il s’inspire de ces voyages et des découvertes culturelles pour nourrir ses écrits. Le théâtre de Claudel passe « par le dépouillement de l’espace, la discontinuité des séquences, le jeu délibéré avec l’impossible et la dérision, la multiplicité des personnages, le recours au sublime à la fois passionnel et religieux, la force du lyrisme et la présence caractéristique dans sa dramaturgie d’images scéniques choc. »1. Le verset, est son outil de prédilection. Ses groupes de mots ne se terminent pas par des pauses syntaxiques mais par une modulation du sens et du son qui suppose ici le travail d’adaptation du comédien par la suite.

1 Michel Corvin, Dictionnaire encyclopédique du théâtre, volume I, p. 190-191, Bordas.

L'Annonce faite à Marie : l'histoire

Auteur apprécié et parfois désavoué, son Annonce faite à Marie est l’une des pièces les plus connues de Claudel.

Le sujet de la pièce prend sa source dans les deux versions de La Jeune Fille Violaine, écrites entre 1892 et 1898.

 

Quatre personnages se donnent la réplique : Violaine, fille d’Anne Vercors ; Jacques Hury, son fiancé ; Pierre de Craon, un architecte ayant eu des sentiments pour Violaine, désormais malade et condamné ; Mara, la sœur envieuse. Les liens se brouillent, les relations entre personnages se font et se défont.

 

Violaine, par compassion, consent à donner un baiser d’adieu à l’architecte qui a contracté la lèpre. Malheureusement pour elle, un témoin l’a vu faire, sa sœur. Forte de cette connaissance, celle-ci va chercher à nuire à Violaine.

Violaine, reniée par les siens, abandonnée par son fiancé, contracte à son tour la lèpre. Elle trouve refuge dans la forêt et se voue à Dieu.

 

Un enfant naît de l’union de Mara et Jacques Hury. Il meurt peu de temps après. Touchée et désespérée, la mère retrouve sa sœur au cœur de la forêt et la prie de demander à Dieu un miracle qu’elle ne peut obtenir seule. Bien qu’elle ressente de l’animosité pour sa sœur, Mara reconnaît la vertu de sa sainteté. Ses prières atteignent l’objectif souhaité et l’enfant est ressuscité.

 

L’acte suivant voit Violaine mourir, tuée par sa sœur emplie de jalousie. Toujours charitable, Violaine obtient pour sa sœur le pardon de son père et de son mari pour l’acte terrible qu’elle a commis.

L’œuvre se termine ainsi sur la guérison miracle de Pierre de Craon et la découverte d’une certaine paix d’esprit chez Mara qui passe par le pardon tandis que sonnent les cloches de l’Angélus : un ange du Seigneur est venu annoncer à Marie…, Angelus Domini nuntiavit Mariae.

 

Extrait de la pièce

Violaine : Paix, Mara ! Voici le jour de Noël où toute joie est née.

Mara : Quelle joie y a-t-il pour moi, sinon que mon enfant vive ?

Violaine : Et nous aussi un petit enfant nous est né !

Mara : Ca bouge, ça bouge, ça bouge ! O mon Dieu, je vois que cela bouge de nouveau. Au nom du Dieu vivant, que dis-tu là ?

Violaine : « Voici que je vous annonce une grande joie… »

Pauvre sœur, elle pleure. Elle a eu trop de peine aussi.

Prends, Mara ! Veux-tu me laisser toujours cet enfant ? (Elle lui tend l’enfant)

Mara : Il vit ! (Mara se jette sur l’enfant et l’arrache violement à sa sœur).

L'équipe artistique

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Célie Pauthe
Philippe Leroux

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