Ressources - Fort

Présentation

Un jeune pianiste arrive au sommet d’une colline. Sur un monticule de pierres envahi par les herbes hautes, il y a un piano. Près du piano, il y a un homme.

Un homme plus très jeune, qui répond à toutes les exigences du soliste, sans jamais dire un mot. Aspiré par le silence, le musicien parle. Parle, comme il n’a jamais parlé. Tout en s’efforçant de se préparer à ce concert en plein air, il dévoile son histoire, et son lien avec cette colline. Il vient jouer dans ce décor improbable de pleine nature. La musique est nécessaire.

Le compositeur brestois Benoît Menut met en musique ce grand texte de Catherine Anne qui évoque la terre natale, l’exil, la guerre et la musique. Même les fantômes peuvent surgir de ce spectacle.

L'histoire

Un pianiste arrive au sommet d'une colline. En pleine nature, un piano gardé par un homme silencieux. Le pianiste virtuose vient donner un concert sur ses terres d'enfance. Ici, autrefois, un village. Village où sa mère musicienne jouait et vivait. Village bombardé depuis. Restent les herbes folles et les souvenirs.

Ici. La musique est nécessaire. Le public arrivera bientôt.

Le soliste est bouleversé, pris dans un conflit entre les émotions de son enfance brisée par la guerre et les préparatifs du concert, il tremble face au clavier noir et blanc. Va-t-il réussir à jouer ? Pour qui doit-il jouer ? Les morts ? Les vivants ? Qui est cet homme muet qui l'observe ? Et cette femme lumineuse qui fait chanter le piano ?

Intention artistique

Un espace dépouillé, aller à l'essentiel, faire surgir les images contenues dans le récit. Fin de monde ou début de nouvelle ère ? Dans le vide, un piano, comme un phœnix. La scénographie de Raymond Sarti va permettre de jouer des effets d'apparition et de disparition des trois corps. Une danse à inventer, entre réel et souvenirs, entre vivants et morts.

Je vois un vieil homme silencieux, presque granitique. Muet. Je vois arriver le prodige, un pianiste bouleversé par la vue du piano dans ce paysage. Je voix apparaître une femme, vive comme une flamme. Elle n'hésite pas à s'approcher du clavier. Elle joue et elle rit ! Elle joue, intensément, magnifiquement, elle fait vibrer le piano de concert. Qui est-elle ? Fantôme de la mère ? Évocation ? Souvenir ?

J'entends la musique jubiler sous ses doigts, alors même que le pianiste célèbre n'ose pas toucher le clavier. J'entends la possibilité d'un cri. J'entends des silences.

Catherine Anne

Fort et Ravel, par Benoît Menut

Contenus

Lorsque j’ai découvert le texte de la pièce Fort de Catherine Anne, outre la qualité théâtrale et littéraire de son œuvre, j’ai été frappé d’emblée par la présence au sein du texte du Concerto pour la main gauche, en ré majeur de Maurice Ravel.

Le sujet propre de Fort est proche de l’histoire même de l’œuvre de Ravel - un enfant, qui deviendra pianiste virtuose, survivant d’une guerre qui a rasé son village et provoqué la mort de sa mère, revient jouer près les ruines du village. Composée entre 1929 et 1931 et créée à Vienne le 5 janvier 1932 par son dédicataire, le pianiste autrichien Paul Wittgenstein, qui avait perdu son bras droit au cours de la Première Guerre mondiale, cette œuvre s’adaptant au handicap d’un soldat survivant représentait le plus beau symbole musical possible : continuité et résurrection.

L'originalité de cette œuvre à la véhémence tragique et à la virtuosité considérable, réside dans sa partie pianistique, écrite pour la seule main gauche de l'interprète. Aussi, j’ai décidé de me servir, dans la musique de scène que j’ai composé, des 30 premières secondes de l’entrée du piano, après une introduction orchestrale aujourd’hui célèbre.

Comme un geste jaillissant, la musique semble exploser au-dessus des bombes, et cette main seule paraît en être quatre. Le caractère pentatonique (mélodie composée de cinq sons) m’a aussi servi de base de travail pour, en quelque sorte, « filtrer » l’esprit de Ravel au sein de Fort.

Le personnage principal de la pièce est aussi fragile que fort, à l’image de certains traits pianistiques, risqués à jouer mais puissants lorsque réussis.

Concerto pour la main gauche (Ravel) avec Boris Berezovsky

Pour en savoir plus sur le Concerto pour la main gauche de Ravel

L'équipe artistique

Contenus

Raymond Sarti - Scénographie

« De l’oeuvre au lieu, de la scène aux paysages. Du sens à la forme… C’est ainsi que prennent forme les scénographies ». Cette phrase de Raymond Sarti évoque bien ce bel artiste ouvert au monde, circulant librement entre théâtre, cinéma, exposition, paysage. Un poète du visuel. Comme scénographe de théâtre, il est le compagnon régulier de François Rancillac, Fabrice Melquiot, Cécile Backès…

Catherine Anne - Texte et mise en scène

Metteuse en scène de la plupart de ses pièces, elle a également mis en scène d’autres contemporains et contemporaines, en particulier Carole Fréchette, Nathalie Papin, Stanislas Cotton, Eugène Durif… ainsi que L’école des femmes de Molière en diptyque avec sa pièce Agnès. Ces trois dernières mises en scène, J’ai rêvé la Révolution créée en janvier 2018, Trois femmes créée en novembre 2019, Dans la caravana créée en octobre 2022, ont été jouées de nombreuses représentations, malgré le contexte difficile de ces années-là.

Entre 1987 — Une année sans été— et 2018 — J’ai rêvé la Révolution —, Catherine Anne a écrit et créé plus de trente pièces de théâtre. Éditées (Actes Sud-Papiers, L’école des loisirs, L’Avant-Scène Théâtre). Créées et jouées dans de nombreux théâtres en France et à l’international. Par des professionnels et par des troupes d’amateurs. L’essentiel des textes est à destination du tout public, et une petite dizaine de titres sont accessibles au jeune public. Elle a également répondu à des commandes d’écriture, en particulier en milieu rural entre 2011 et 2018. Textes inspirés par la réalité des villages et créés “in situ”, actuellement inédits.

Benoît Menut - Composition musicale

“ De l’énergie en sons, portée par du sens ”. C’est ainsi que le compositeur Benoît Menut aime à définir son travail. Il se passionne pour le lien étroit entre musique et mots, ces derniers étant une source d’inspiration permanente, tant dans sa musique vocale qu’instrumentale.

Né à la pointe Ouest de l’Europe occidentale, il y reçoit les conseils du compositeur Pierick Houdy et poursuit sa formation au CNR puis au CNSM de Paris ; éveillé parallèlement à la tradition par le compositeur Olivier Greif.

Comprenant plus de 120 opus, son catalogue embrasse toutes les formes d’expression musicale et fait de lui un des compositeurs français les plus en vue de sa génération. Avec l’exigence d’une écriture lyrique et structurée et une sincère volonté de rester proche du public et des interprètes.

Grand Prix SACEM 2016 de la musique symphonique (catégorie jeune compositeur) et lauréat des fondations Banque Populaire (2008) et Francis et Mica Salabert (2014), prix Nouveau Talent de la SACD 2019 et le Prix Charles Oulmont 2019. Nommé aux Victoires de la Musique, catégorie compositeur en 2021 pour Les Îles, en 2022 pour Une Odyssée.

Il a été en résidence à l’Orchestre Symphonique de Bretagne de 2014 à 2020.

Il poursuit aussi une trajectoire théâtrale, Stella et le Maître des souhaits, opéra créé à la Philharmonie de Paris en 2021 et Symphonie pour une Plume, 2016, pour l’Orchestre Symphonique de Bretagne, repris par l’Orchestre National d’Île-de-France, La Légende de Saint Julien, d’après Gustave Flaubert, Le petit garçon qui avait envie d’espace de Jean Giono.

Un trio d'interprètes, par Catherine Anne

Contenus

Dana Ciocarlie a une force musicale et une subtilité qui me touchent vraiment. Elle a aussi une façon d’oser être en jeu comme actrice qui apporte une vitalité et de la fantaisie à sa présence sur scène. Elle apporte une lumière et une joyeuse énergie. La rencontre entre elle et ses deux partenaires comédiens est puissante et tendre.

Sava Lolov, que j’avais engagé dès sa sortie du CNSAD, est un comédien étonnant, avec un corps d’enfant géant, une voix qui peut attraper les émotions de façon surprenante. C’est aussi un amoureux de poésie, un homme de caractère et un artiste au parcours très singulier. Après les deux ans de créations que nous avons vécu ensemble entre 1992 et 1994, Sava a choisi avec force et conviction les aventures artistiques dans lesquelles il s’est épanoui. C’est un bonheur de le retrouver dans une création à venir.

Yves Bressiant, je l’avais engagé pour une mise en lecture au TNG à Lyon, il y a quelques années. C’est un comédien très sensible au texte et un partenaire de travail solide. Je lui ai proposé la partition difficile de l’homme silencieux, car je crois qu’il faut à cette place un acteur aigu, inventif, capable d’entrer en relation de jeu aussi bien avec Sava Lolov qu’avec Dana Ciocarlie. Dès la première semaine de résidence de création au TNP en avril 2021, Yves Bressiant s’est révélé l’interprète idéal pour le silence de Fort.

Documents en +

Certaines ressources sont déjà disponibles sur notre site internet. Vous pouvez les retrouver sur la page du spectacle Fort.